Raquettes

A - Audrey Isaac
S - Simon Condo

A – Alors ton anniversaire était samedi?
S – Mon anniversaire était vendredi!
A – Vendredi, le 8 mai. En quelle année êtes-vous né?
S – 1932!
A – Mon Dieu! Alors, Simon Condo, vous avez dit que votre père a été Chef?
S – Mon père était le chef, oui.
A – Est-ce qu’il fabriquait des raquettes?
S – Il faisait des raquettes. Il fabriquait seulement le cadre des raquettes.
A – Quel âge aviez-vous quand vous avez vous-mêmes commencé à fabriquer des raquettes?
S – J’avais trente-cinq ans!
A – De quoi vous rappelez-vous…Je crois que la première chose à faire est d’aller dans le bois.
S – Oui. On avait l’habitude d’aller dans le bois à environ 40 milles d’ici. Quand on revenait à la maison, on fendait le bois en deux pour faire les raquettes. On utilisait du frêne brun, pas du frêne noir. Il fallait ensuite sabler le bois. Ce bois servait aussi à faire des paniers. On utilisait le frêne brun parce que le frêne noir ne permettait pas de faire la même chose que le frêne brun.
A – D’accord. Vous alliez 40 milles dans le bois pour trouver du frêne brun. Comment le rameniez-vous à la maison?
S – On le ramenait avec un petit camion. On ramenait 4 à 5 billots à la fois parce que chacun mesurait environ 7 pieds de long.
A – Comment saviez-vous que l’arbre était prêt à être utilisé? Comment pouviez-vous dire que c’était un bon arbre?
S – On le savait en l’examinant. Les différentes couches du frêne brun ne sont pas de la même couleur que le frêne noir. Le frêne brun est un peu plus clair que le frêne noir qui a une coloration noire.
A – Tu parles de l’écorce, n’est-ce pas?
S – L’écorce, oui, est plus blanche et pour le frêne noir, plus sombre. On peut le voir en les examinant. C’est la même chose pour les paniers. Nous savons ce que nous recherchons. Ensuite, il suffit de les couper. On regarde les couches de l’arbre. Si le bois est bon, on le coupe. Si les couches de l’arbre sont trop minces, on ne le coupe pas.
A – Est-ce que tu peux dire l’espace entre l’écorce? Des espaces blancs?
S – Les espaces blancs et bruns, c’est ce qu’on utilise.
A – Le plus blanc signifie qu’il y a plus de couches à l’arbre.
S – Plus de couches et plus épais.
A – Quand tu ramènes les arbres à la maison, est-ce que tu enlèves l’écorce tout de suite?
S – On doit le faire tout de suite parce que si on entrepose l’arbre pendant 3 à 4 jours, il sera plus difficile à utiliser. On coupe des languettes d’un pouce, alors on coupe des languettes de un pouce par un pouce. On enlève l’écorce, on nettoie les languettes et on les coupes à la bonne longueur. Après cela on les « bouille » environ trois à quatre heures.
A – Habituellement, quelle est la longueur d’une languette de bois?
S – 7 pieds.
A – Quelle est la dimension de votre contenant pour bouillir le bois?
S – On a des bouilloires de 8 pieds. Auparavant, on utilisait des réservoirs pour l’eau chaude. On faisait un trou au milieu et on versait de l’eau.
A – C’était fait à partir de vieux réservoirs pour l’eau chaude.
S – Il fallait en soude 2 pour obtenir une bouilloire de 9 pieds. Ensuite, on met l’eau dans deux tuyaux pour obtenir de l’eau chaude. On met le bois à l’intérieur et on fait bouillir l’eau. Ça rend le bois facile à courber. Avec la quantité de bois qu’on a, on peut fabriquer 5 paires de raquettes. Ensuite, on les retire des tuyaux pour les insérer dans un moule pour qu’il prenne la forme de raquettes.
A – Qu’est-ce que vous utilisez pour faire les moules?
S – Du cèdre.
A – C’était de solides morceaux de bois?
S – Non, ce n’était pas de solides morceaux de bois, il fallait faire le cadre.
A – Tu places ton bois à quel endroit...?
S – À l’extérieur du cadre! On avait toutes sortes de moules pour faire toutes sortes de formes de raquettes.
A – Vous aviez différents modèles?
S – En ce temps-là, quand vous aviez besoin d’une raquette ronde, il fallait le moule correspondant. Pour une raquette longue de 42 pouces, on avait un moule pour ce modèle. Si on voulait un modèle de 36 pouces, on avait un moule pour ça aussi.
A – Quel était le modèle le plus populaire?
S – La plus populaire était la raquette ronde. C’était celle qu’on vendait le plus.
A – Pourquoi c’était celle qui se vendait le plus?
S – C’était plus facile de travailler avec ces raquettes. C’était aussi plus facile de marcher et tu tombes moins souvent avec ces raquettes. Avec les raquettes plus longues qui avaient une « queue en bois », elles te faisaient chuter. Avec les rondes, tu pouvais monter les pentes dans le bois. Avec les longues, tu ne pouvais pas monter parce qu’au moment où tu commençais à gravir une pente, tu glissais aussitôt. C’est comme ça que c’était.
A – Est-ce que les rondes étaient un modèle plus ancien?
S – Non, c’est un modèle plus récent. Mon père est allé au village huron pour voir quelles sortes de raquettes ils fabriquaient. Il a découvert qu’il y en avait de différentes dimensions et il est revenu à la maison avec différents moules pour les raquettes. C’est à ce moment-là qu’il a commencé à fabriquer des raquettes.
A – La première chose qu’il fallait faire, c’est de mettre le bois dans le moule?
S – Le mettre dans le moule pendant une journée. Le jour suivant, il faut travailler l’intérieur de la raquette. Il faut mettre les « écarteurs » (spacers). Grâce à ces pièces, la raquette prend sa forme. Quand cette étape est terminée, on commence à faire la raquette.
A – Pour lacer les raquettes, il y a deux petits trous?
A – Est-ce qu’ils utilisent du nylon?
S – C’est ce qu’on utilise de nos jours.
A – Est-ce que tu as déjà utilisé du cuir?
S - Oui, j’ai déjà utilisé du cuir.
A - Où le trouviez-vous à cette époque?
S – On l’achetait au Québec quelque part. On achetait beaucoup de cuirs.
A – Une fois le moule fait et les trous percés, est-ce que vous commenciez à lacer les raquettes? De nos jours, vous utilisez des fibres synthétiques?
S – Oui. Un nylon spécial. Ça dépend quelles sortes de raquettes tu fabriques. Une raquette pour un homme exige un nylon plus épais. Le type de catégorie 1 est utilisé pour celles-là.
A – Est-ce que c’est suffisamment solide?
S – Non, ce ne l’est pas. Mais si on utilise du nylon de type numéro 4, ce serait parfait.
A – Où trouves-tu tes lacets pour les raquettes?
S – On le trouve au marché de poisson de Carleton.
A – Au marché de poisson? Est-ce que c’est comme du filet pour attraper le poisson?
S – Oui, c’est comme du filet pour attraper le poisson.
A – Est-ce que c’est ciré?
S – Oh oui de la cire. J’utilisais celui qui est ciré parce que j’avais l’habitude de travailler dans la maison. Si tu utilisais l’autre sorte…oh mon dieu, si tu entrais avec ça dans la maison, ça puait. Ça sentait vraiment mauvais. J’étais habitué à l’odeur. J’ai travaillé avec ça pendant des années. Je pouvais lacer 32 paires en une journée, de 7 heures du matin jusqu’à 11 heures le soir.
A – Wow.
S – Je suis tellement habitué à ça!
A – Tu devais aimer ça en ce temps-là?
S – Oh oui, je m’assoyais et je laçais et je laçais. Parfois, je m’arrêtais pour une cigarette et ensuite, je continuais.
A – Vous aimiez ça?
S – Oui, beaucoup.
A – À ce point?
S – J’en ai tellement fabriqué que je suis devenu très habile, même meilleure que les femmes. Je n’ai plus travaillé depuis près de 3 ans maintenant. 3 ans que je n’ai plus rien fait. J’ai cessé de lacer des raquettes. Je ne travaille plus parce que je n’ai plus assez de force dans mes mains parce que j’ai le cancer des os. Je crois que c’est parti. J’ai reçu des traitements pendant 8 mois.
A – Alors tu laçais 32 paires. Quand tu avais fini de lacer les raquettes est-ce que tu les vernissais le bois?
S – Non, on les laissait sécher pendant 2 jours et après ça, on appliquait du vernis.
S – On vernissait la boucle et le bois.
A – Est-ce que tu posais du vernis sur les lacets aussi?
S – Oui, le filet, le cuir, On vernissait tout.
A – Ça prenait combien de temps à sécher?
S – Ça prenait environ 2 jours. Après ça on les vendait, mais on ne mettait pas la sangle pour les pieds.
A – Qui le faisait?
S – La personne qui achetait les raquettes était responsable de mettre les sangles.
A – Pouviez-vous acheter les sangles au magasin?
S – Oui, vous pouvez acheter les sangles au magasin.
A – Durant toute votre vie, combien de raquettes pensez-vous avoir fabriquées?
S – Quand j’enseignais là-bas, j’ai fabriqué 230 paires en 8 semaines.
Femme – Il a fait ça, juste en enseignant.
S – En enseignant, j’avais 8 élèves. Nous avons fabriqué 230 paires.
A – Wow. Je crois que durant votre vie, vous en avez fabriqué plus de 1 000.
S – Bien plus que 1 000. Je ne suis pas certain du nombre parce que j’ai lacé pour l’école.
A – Est-ce que tu fabriquais les raquettes en hiver?
S – En hiver, oui.

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Communautés: 
Gesgapegiag
Auteur: 
Audrey Isaac
Simon Condo donne des instructions sur la fabrication des raquettes.

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